Totoco, au coeur de la Biosphère d’une Ile Volcanique

Totoco Ecolodge Ometepe Nicaragua

Le plus grand lac d’Amérique Centrale est au Nicaragua, et au centre de celui-ci, un joli trésor : la tranquille île d’Ometepe et ses deux imposants volcans. L’un d’eux est toujours en activité, culmine à 1 600 m d’altitude et menace d’exploser du jour au lendemain. Ce sont donc sur les pentes du second (qui est profondément endormi) que Martjin et ses investisseurs ont choisi de développer leur projet de tourisme responsable, Totoco, où je séjourne cette semaine. Totoco, c’est un ecolodge de 8 bungalows, mais pas seulement: ferme bio, fondation aux multiples projets de développement local… je vous explique !

Revenons d’abord sur le cas du Nicaragua

Révolution Sandiniste NicaraguaLe Nicaragua est un pays qui a connu une longue et encore récente période de guerre civile et de conflits armés internes. Mais on peut dire que depuis 1990, le pays est maintenant relativement stable. Il est d’ailleurs considéré comme un des plus sécuritaires d’Amérique Centrale.

Le Costa Rica, son petit voisin, est devenu la grande destination « éco-touristique » à la mode. Imaginez un peu, le Nicaragua, c’est un peu « toute la richesse naturelle du Costa Rica, pour deux fois moins cher », et puis en beaucoup moins touristique, voire quasiment inexplorée pour certaines régions (en-dehors du triangle d’or Granada-San Juan del Sur-Ometepe, et quelques plages « resorts-all-inclusive » de la côte Atlantique). On parle d’ailleurs d’une des cinq « nouvelles destinations » à travers le monde.

J’ai eu l’opportunité d’assister à Managua à une très intéressante présentation menée par un projet du CBI, le Ministère des Affaires Étrangères des Pays-Bas, (cf la présentation en espagnol ici) en soutien à INTUR, l’organisme nicaraguayen en charge de la promotion du tourisme à l’international. Il s’agit d’une étude comparative des stratégies touristiques du Costa Rica, Pérou, Équateur et Guatemala. L’objectif est d’aider le Nicaragua à s’inspirer des meilleures pratiques de ces quatre pays qui partagent plus ou moins les mêmes attraits : volcans, nature, activités d’aventure, villes coloniales et surf. Je n’ai aucun doute quant au grand succès à venir de la destination… et je ne suis pas la seule !

NB: CBI a aussi rédigé de très nombreuses études (en anglais et en espagnol) développant des conseils et plans d’actions marketing détaillés pour mieux cibler et travailler différents marchés touristiques de niche (bird-watching, ecotourisme, volontariat, etc…). Bonne nouvelle, cette mine d’or est à libre disposition via leur site internet! Et comme je suis super sympa, je vous donne le lien 😉 Abracadabra, voici :
http://www.cbi.eu/marketintel_platform/tourism/136109/factsheet

Totoco, le triangle vertueux

Florie et Martjin Totoco Ecolodge NicraguaMartijn est hollandais. Il a étudié le commerce international, beaucoup voyagé, et même vécu à Madrid quelques années. Depuis ses années étudiantes, Martijn avait en tête un projet : développer un projet touristique qui soit véritablement responsable. Il a alors étudié les opportunités (et menaces) de différentes destinations à travers le monde, et rapidement son choix s’est porté vers le Nicaragua. (Tiens donc, après le CBI rencontré à Managua, à nouveau un hollandais ! Martijn m’explique que les Pays-Bas étaient un des quelques pays qui n’ont pas suivi les États-Unis et leur embargo total sur le commerce envers le Nicaragua en 1985, conservant des relations internationales d’autant plus favorables avec le pays.)

En 2001, Martijn part alors à la découverte du pays, et se décide finalement pour l’île d’Ometepe. Il retourne aux Pays Bas, prépare un solide business plan et rassemble quelques investisseurs. En 2009, Totoco accueille ses premiers clients.

L’écolodge produit de manière renouvelable pratiquement toute son énergie et a mis en place un système de gestion des eaux usées et des déchets 100% responsable. Mais le concept de Totoco est plus global. Totoco, ce sont trois entités financièrement autonomes qui travaillent ensemble de manière responsable dans la même direction : la ferme biologique (qui met l’accent sur l’aspect écologique), la fondation (aspect social) et l’ecolodge (aspect économique). Martijn m’explique l’importance, selon lui, d’avoir trois entités indépendantes pour ancrer dans le temps les missions de respect de l’environnement et de développement local du projet. Il peut arriver qu’un hôtel, ayant au départ une réelle telle volonté responsable, la perde avec le temps au profit par exemple de décisions permettant un rendement économique plus favorable sur le court terme (surtout en période de crise économique). Le fait d’avoir trois entités autonomes permettrait dans ce cas d’éviter cela.

Je vous invite à retrouver toutes les pratiques de Totoco pour un tourisme responsable directement sur Hopineo en cliquant ici, via la video, et les deux présentations en anglais (pratiques durables et stratégie e-marketing) ci-dessous à la fin de l’article.

Et ce projet de canal chinois alors ?

Totoco Volcan Concepcion NicaraguaHa, ha, c’est vraiment le grand débat et la grande inquiétude du moment à travers le pays (cf une introduction au sujet en video grâce à la super émission « Le Dessous des Cartes »). Et les bateaux passeraient alors juste au sud de l’île d’Ometepe, à travers le lac…

Je n’ai hélas pas de réponse claire à vous apporter.

Certains disent que tout cela, c’est comme la « télé novela » (l’équivalent du « Plus belle la vie » d’Amérique Latine). Ça fait beaucoup parler, mais le canal ne sera jamais creusé. Les chinois en profiteraient pour mettre en place des zones franches, construire de grands complexes touristiques, ports des deux côtés reliés avec un chemin de fer… mais sans jamais véritablement creuser un énorme canal et transformer la rivière « Rio San Juan » en zone bétonnée, ou en détruisant des villages et inondant de nombreuses terres, détruisant la faune et flore sur son passage, et polluant le lac du Nicaragua : pour résumer une belle énorme bêtise (catastrophe ?) écologique pour le Nicaragua au profit des bénéfices économiques. Non, non, ils ne vont jamais faire tout cela… c’est la version en laquelle j’aimerais vraiment croire…

D’autres me disent aussi que si les chinois sont sur le coup (il s’agit « officiellement » d’une entreprise privée, pas du Gouvernement), c’est bien parce qu’ils ont prévu de passer à l’action. Quand Pékin veut quelque chose, Pékin l’obtient généralement (cf. les Jeux Olympiques). Ils en ont les moyens (économiques, techniques et humains), et le fait de pouvoir contrôler un tel point de passage entre le Pacifique et l’Atlantique, à la fois pour leur flotte commerciale et militaire, c’est tout de même un sacré atout stratégique, non ?

Dans l’accord signé entre le gouvernement de « Daniel » et l’entreprise chinoise concessionnaire du projet, il est stipulé que les terrains nécessaires à la construction du canal seront mis à disposition de celle-ci au prix de leur « valeur cadastrale ». Ce qui serait apparemment très (bien trop ?) dérisoire… Aux stations services, dans le bus, à l’épicerie, les gens commencent à parler… la prochaine révolte nica est-elle en route?

Ci-dessous les deux présentations et la vidéo de Totoco: